International Journal of Social Sciences and Scientific Studies (2022)
IMPACT DE LA MODIFICATION DE LA GARANTIE LÉGALE DE STABILITÉ SUR LES INVESTISSEMENTS MINIERS EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO☆
KALAMBA MULUMBATI Gustavea*
a.Chef de Travaux, Avocat près la cour d’Appel de Lubumbashi et de Kolwezi Mandataire en Mines et Carrières,
Received 20 August 2022; Accepted 5 September 2022
Available online 1 October 2022
2787-0146/© .
A R T I C L E I N F O
Keywords:
Mines
Modification
Garentie
Stabilite
Loi
A B S T R A C T
La législation minière en République Démocratique du Congo a connu plusieurs modifications. La plus récente est celle de 2018 qui selon l’article 217 ramène la garantie de stabilité de Dix ans à cinq ans.
Dès lors quelques interrogations ont été exprimé à savoir s’il était nécessaire de modifier la garantie légale de stabilité et quelles en seraient les conséquences sur les investissements miniers présents et futurs ? Ou encore s’il fallait garder le même délai de la garantie légale de stabilité, revoir à la hausse ou à la baisse ou tout simplement la supprimer ?
Notre réflexion nous permis de retenir que le concept lui-même n’est pas définie par le législateur. Cependant la doctrine l’a définie comme un mécanisme mis en place par le code minier qui astreint le pouvoir public à garantir aux investisseurs privés établis sur le territoire congolais des risques divers pouvant les affecter. En occurrence, pendant dix ans aucune modification ne pouvait être effectué sur le code minier de nature à décourager les investisseurs nouveaux étant incompatible avec les investissements à long terme.
Nous notons que la modification du code minier, spécialement de la Garantie légale de stabilité est légale, légitime, conforme et nécessaire. Il s’agit de l’exercice par l’Etat des attributs de sa souveraineté. Nous avons également relevé que la loi modificative ne devrait pas porter atteinte aux bénéficiaires des droits acquis garantis par la Garantie Légale de Stabilité.
En termes des suggestions, ayant constaté que l’Etat n’a pas atteint ses objectifs de maximisation des recettes deux ans après la promulgation de la loi modificative, nous avons, en ce qui nous concerne, proposé, dans un premier temps, la suppression de la garantie légale de stabilité, et dans un second temps, la reconduction du délai originel, mais aussi la réduction sensible de l’étendue de la Garantie légale de stabilité, en supprimant le régime fiscal.
De par sa configuration actuelle, la République Démocratique du Congo est un géant pays au centre de l’Afrique. Son sous-sol recèle une gamme variée et abondante des ressources naturelles. D’immenses gisements miniers y dorment, depuis la nuit de temps, dont le législateur colonial avait entrepris l’encadrement de son exploitation. Sur les traces du colonisateur, le législateur du Congo, devenu indépendant, avait continué l’encadrement de l’exploitation minière pour le bien-être de sa population. C’est ainsi que jusqu’à ce jour, la République Démocratique du Congo est à sa quatrième génération de sa législation minière.
La République Démocratique du Congo est un pays aux immenses et nombreuses richesses naturelles. Paradoxalement, sa population vit dans une pauvreté extrême qui frise la misère.
En effet, la misère dans laquelle croupissent les populations congolaises fut l’un des éléments incitateurs de la mise sur pied du code minier de 2002, vanté d’être incitateur d’investissements. Ainsi, convient-il d’admettre que ledit code contenait des dispositions favorables pour attirer de nouveaux investisseurs et relancer le secteur minier. Il en était ainsi de la fiscalité peu contraignante mais également d’une garantie légale de stabilité dont le délai fut de 10 ans.
Il s’avère que, dans une logique souverainiste, la modification ou mieux la révision du minier de 2002 a été profonde et innovatrice. L’article 276 de la loi n°007/2002 du 11 juillet 2002 telle que modifiée et complétée par la loi n°18/001 du 09 mars 2018 a subi une modification totale dans sa substance. La garantie légale de stabilité qui fut jadis de 10 ans est revue à la baisse jusqu’à 5 ans. La portée et les bénéficiaires de cette garantie ont également fait l’objet de cette modification.
Or, il est indubitablement vrai que pareille modification ne va pas sans incidence sur les investissements tant présents que futurs et, par ricochet, sur les finances publiques de l’Etat.
- Les conséquences de la reforme
En effet, s’agissant de la modification de la garantie légale de stabilité prise comme une réforme de la politique minière en vue d’atteindre l’objectif que s’est assigné le législateur congolais, celle-ci (la garantie légale de stabilité) rend la modification du code minier inutile, sinon impossible. Là est le premier versant du problème.
En tout état de cause, à quelques exceptions près, les études statistiques ont démontré que le volume d’investissements et de la production minière ont été plus importants dans la période allant de 1937 à 1966 comparativement à la période de 1967 à 1996 sous la loi minière de 1981. Il sied de noter que le régime de stabilité organisé sous la législation de 1981 n’était favorable aux investissements[1].
Pour pallier cette insuffisance, le législateur a mis sur pied sa nouvelle législation minière incitative avec un régime de stabilité favorable. C’est ainsi que, sous la houlette de cette législation, la République Démocratique du Congo a atteint un point culminant en termes de demande de permis de recherche (P.R.) jusqu’à plus de 500. Le nombre d’entreprises est passé de 7 après 1997 à plus de 200 entreprises après 2002[2].
Par ailleurs, le législateur congolais modifiant la garantie légale de stabilité, en passant de 10 à 5 ans semble, aux yeux des investisseurs, a pu avoir créé une instabilité financière latente vu la hauteur des investissements. C’est ainsi qu’au lendemain de cette modification plusieurs voix se sont levées contre certaines modifications et particulièrement avec acuité, la modification de la garantie légale de stabilité. Cette situation entraine sans doute une faible affluence des entreprises minières.
A cet effet notre réflexion a été formulée de la manière que voici
Était-il nécessaire de modifier la garantie légale de stabilité et quelles en seraient les conséquences sur les investissements miniers présents et futurs ? Fallait-il garder le même délai de la garantie légale de stabilité, revoir à la hausse ou à la baisse ou tout simplement la supprimer ?
En effet, nul n’est sans savoir que chaque Etat souverain a le droit de modifier à sa guise sa législation dans l’intérêt du souverain primaire qu’est le peuple. N’étant pas profitable au peuple congolais, nous pensons que la modification du code minier, en tant qu’une réforme de la politique minière de l’Etat pour que le peuple congolais se retrouve, serait une nécessité ; mais que la réduction de la garantie légale de stabilité à 5 ans serait sans grande incidence sur les finances publiques. Car, disons-le, cette modification ne produira ses effets qu’à long terme, soit 10 ans après pour les investisseurs ayant des permis d’exploitation (P.E.) au moment de l’entrée en vigueur du code minier révisé et même plus tard, pour les entreprises ayant les PR à la date de l’entrée en vigueur de la présente loi révisée.
Quant à son impact sur les investissements présents, le principe des droits acquis trancherait sur la question et ouvrirait la brèche, sans la fermer, pour les investissements futurs qui, selon notre perception, connaitraient un frein. Avec ceci, si la suppression de la garantie légale de stabilité n’était pas possible ou envisageable, les modifications du code minier devraient alors, dans des cas précis, être d’application immédiate à tous.
- Notions sur la garantie légale de stabilité
- Définition
En l’absence d’une définition légale de la garantie légale de stabilité, la doctrine s’accorde qu’il s’agit d’un mécanisme mis en place par le code minier qui astreint les pouvoirs publics à garantir aux investisseurs privés établis sur le territoire congolais contre les risques divers pouvant les affecter[3].
En fait, nous dira Emery MUKENDI, par les termes « garantie légale de stabilité », nous voudrions insister sur la nature même de la garantie. Elle est consignée dans une loi à l’opposé de la clause de stabilité qui est convenue par les parties dans un contrat légalement formé[4].
Nous déduisons de ce qui précède qu’il s’agit de mettre en exergue le niveau de l’engagement de l’Etat vis-à-vis des bénéficiaires de cette garantie. Cette garantie a une valeur légale et non conventionnelle « Garantie conventionnelle de stabilité » ou « clause de stabilité ».
Ainsi nous n’abordons pas la question de clauses de stabilité contenues dans les conventions minières en vigueur qui a un fondement dans la loi. Nous abordons plutôt la question liée à garantie de stabilité que la loi accorde aux investisseurs miniers.
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- Fondement légal de la garantie de stabilité
La garantie légale de stabilité trouve son fondement dans le titre 10 et le titre 17 de l’exposé des motifs de notre code minier.
Dans le titre 10, il est prévu les garanties de l’Etat congolais. En effet, ce dernier garantit la stabilité des dispositions constituant le code minier et s’interdit de le modifier si ce n’est que dans la forme prévue dans le code minier.
En sus, la garantie de stabilité trouve son fondement à l’article 276 du code minier par lequel l’Etat garantit que les dispositions du code minier peuvent être modifiées que si et seulement si ce code fait lui-même objet d’une modification adoptée par le parlement. L’Etat assure au titulaire des droits octroyés, sous l’empire de la présente loi, la garantie du régime fiscal, douanier et de change qui demeure acquise et intangible jusqu’à une période de cinq ans à compter de la date de :
- L’entrée en vigueur du présent code pour les droits miniers d’exploitation valides existant à cette date ;
- L’octroi du droit minier d’exploitation postérieurement en vertu d’un permis de recherches valides existant à la date de l’entrée en vigueur de la présente loi[5].
En effet, force est pour nous de signaler que la présente disposition constitue le socle, la poutre maîtresse de notre réflexion. Elle fera l’objet d’une analyse approfondie dans le point qui suit.
Par ailleurs, la garantie de stabilité est renforcée par l’article 222 qui prévoit les dispositions fiscales et douanières les plus favorables. En effet, il est stipulé que si une législation de droit commun adoptée ou promulguée sur le territoire national postérieurement à la date de l’entrée en vigueur du code minier, les dispositions fiscales et douanières plus favorables que celles contenues dans ledit code sont immédiatement applicables de plein droit dès l’entrée en vigueur[6].
Après avoir énoncé le fondement légal, il importe d’en donner son importance.
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- Importance de la garantie de stabilité
D’aucuns n’ignorent, surtout ceux-là dont la chose intéresse, que l’institution de la garantie légale de stabilité par le législateur Congolais est importante tant pour le gouvernement que pour les promoteurs des projets miniers en R.D.C. Elle est la pierre angulaire de la politique minière nationale en ce sens qu’elle stimule la mobilisation des investissements privés dans le secteur minier.
C’est ce qu’explique le législateur en affirmant ce qui suit dans l’exposé des motifs : « l’Etat congolais garantit aux titulaires des droits miniers l’existence d’un bon climat d’investissement se traduisant par l’engagement exprès pris par lui quant au respect des droits accordés en vertu du nouveau code et l’accomplissement de ses devoirs qui en résultent »[7].
Plusieurs auteurs, à l’instar de MUKENDI WA FWANA Emery, s’accordent que la garantie légale de stabilité constitue pour les promoteurs des projets miniers, le gage de stabilité des prévisions d’investissement sur une période donnée, par rapport à l’évolution de la législation et à la réglementation qui peut affecter leurs activités minières.
C’est donc en vertu de cette garantie, dit-il, que les promoteurs des projets miniers ont, en toute confiance, établi leurs prévisions d’investissement sur une période donnée dans différents projets miniers. Ils ont, à cet effet, conçu leurs projets en cours suivant un arsenal juridique et financier tenant compte des dispositions légales en vigueur au moment de leur prise de décision d’investir et de réaliser des activités en République Démocratique du Congo[8].
La doctrine étant toujours partagée, un autre courant négativiste auquel appartient KALUNGA TSHIKALA pense que la garantie légale de stabilité est anti souverainiste en ce qu’elle rend impossible, si pas inutile, toute modification du code minier[9].
Pour notre part, la position que nous prenons est mitigée. D’une part, nous pensons que la garantie légale de stabilité vaut son pesant d’or en ce qu’elle permet d’assurer une certaine stabilité du climat des affaires, mais surtout par le fait que c’est un véritable élément incitateur, d’autre part nous estimons qu’il faille réduire son champ d’application et instaurer l’immédiateté d’application dans une certaine mesure.
C’est sur cette lancée que nous continuerons notre analyse tout en mettant un accent particulier sur la question de l’incidence de la garantie légale de stabilité sur les projets miniers.
- L’INCIDENCE DE LA GARANTIE LEGALE DE STABILITE SUR LES PROJETS MINIERS AU REGARD DE LA LOI DE 2018
La modification du code minier a alimenté les débats dans la sphère juridique congolaise. Plusieurs dispositions ont subi cette modification au nombre desquelles l’article 276 du code minier qui consacre la garantie légale de stabilité des projets miniers. Cette modification a entrainé à sa suite certaines incidences (positives ou négatives) sur divers plans.
Pour la petite histoire, la GLS est d’origine conventionnelle, en ce sens qu’elle résulte de la mise en commun de différentes clauses de stabilité, communément connues sous l’appellation de « clauses parapluies » ou « umbrella clauses »[10], contenues dans les conventions minières de l’époque.
Eu égard à tout ce qui précède, il convient de signaler avec Pascal ANCEL qu’à l’opposé des clauses de stabilité qui résultent d’une approche de contractualisation de la norme légale[11], la garantie légale de stabilité est le résultat d’une démarche d’élévation de la norme contractuelle comme norme législative.
A ce titre, la GLS a aussi son encrage la Constitution de notre pays. Le libellé de l’article 36 est plus éloquent : « l’Etat encourage et veille à la sécurité des investissements privés, nationaux et étrangers ». Cette sécurité des investissements passe par une sécurité matérielle et, de surcroît, juridique. La protection des investissements ainsi pris dans un sens large passe, dans le secteur minier, par la mise en place de la garantie légale de stabilité. Si la GLS est prévue, comment fonctionne-t-elle ?
4.1. Fonctionnement de la garantie légale de stabilité
L’Etat garantit que les dispositions du présent code ne peuvent être modifiées que si et seulement si le présent code fait lui-même objet d’une modification législative adoptée par le Parlement. L’Etat assure au titulaire de droits octroyés sous l’empire de la présente loi la garantie de stabilité du régime fiscal, douanier et de change qui demeure acquise et intangible qu’à la fin d’une période de dix 10 ans à compter de la date de :
- L’entrée en vigueur du présent code pour les droits miniers d’exploitation valides existants à cette date. ;
- L’octroi du droit minier d’exploitation acquis postérieurement en vertu d’un permis de recherche valide existant à la date de l’entrée en vigueur de cette loi[12].
4.2. Les effets de la mise en œuvre de la garantie légale de stabilité
La garantie légale de stabilité est inopérante dans la vie normale du code minier. Elle n’opère qu’en cas d’une modification législative du code. Dans pareille occurrence, les titulaires des droits miniers en cours de validité ont le parfait privilège de se prévaloir de la garantie légale de stabilité pour sécuriser juridiquement leurs projets miniers et d’en réclamer le bénéfice intégral.
L’exercice de droit nous amène à trois hypothèses distinctes selon que la modification a affecté les régimes fiscal, douanier et de change et autres garanties sans toucher à la garantie légale de stabilité ou que la modification a touché seulement le délai de la garantie légale de stabilité, sans affecter les régimes fiscal, douanier et de change. La dernière hypothèse est celle dans laquelle les deux ont été affectés.
En effet, dans les deux premières hypothèses, la solution qui se présente est le strict respect de la période d’intangibilité, et les nouvelles dispositions ne seront applicables qu’après l’écoulement du délai de dix ans.
Par ailleurs, lorsque les deux ont été touchés, il est admis, en raison de l’importance de cette garantie que le délai de 10 ans de l’entrée en vigueur des autres dispositions du code minier commencera à courir à partir de la mise en application de la nouvelle garantie légale de stabilité[13]. Il en sera ainsi, ajoute MUKENDI, dans la mesure où la stabilité des autres avantages et bénéfices acquis par le titulaire découlent de la stabilité de garantie légale de stabilité[14].
Dans le présent point nous nous évertuerons à cerner les points suivants : la visée, la légalité et la conformité de la révision du code minier.
D’aucuns ignorent que les activités économiques sont dynamiques et tributaires à la conjoncture économique qui, du reste, est mouvante. D’où la nécessité de la flexibilité de la législation, qui doit s’adapter aux faits qu’elle régit. C’est ainsi que toute révision d’une législation ne se fait que pour une visée bien précise.
- . De la légalité, légitimité et conformité de la révision du code minier
Il et de toute évidence que la R.D.C., entant qu’Etat souverain, dispose de la liberté normative et des prérogatives d’action d’intérêt général[15].
En outre, l’Etat a le droit légitime de modifier le code minier pour se conformer au devoir que la Constitution impose aux autorités gouvernementales de générer les ressources financières nécessaires pour le bien-être de la population. L’article 56 de notre Constitution est plus explicite quant à ce en disposant : « tous les congolais ont le droit de jouir des richesses nationales. L’Etat a le devoir de les redistribuer équitablement et de garantir le droit au développement »[16].
L’exercice de ces droits et l’accomplissement de ces devoirs constitutionnels implique que l’Etat a non seulement le droit d’édicter des lois devant régir les activités minières sur l’ensemble de son territoire, mais aussi celui de le modifier ad nutum pour atteindre les objectifs de sa politique[17]. Il ressort de ce qui précède qu’aucune personne, les investisseurs miniers y compris ne peut empêcher l’Etat à réviser le code minier tant pour le besoin de la cause que pour la cause du besoin.
Cependant, E. MUKENDI note avec pertinence que toute modification, révision ou réforme des cadres juridique, fiscal, douanier du code minier doit être faite dans le respect de la même Constitution, des Traités internationaux dûment ratifiés, des lois de la République et des engagements conventionnels de l’Etat[18].
Ce faisant, même si la modification, la révision, la réforme du code minier est légale, légitime et conforme, l’Etat, par l’entremise de son Gouvernement, est dans l’obligation d’assainir le climat des affaires qui passe par une sécurité juridique qui a pour corolaire le respect du principe des droits acquis. En cas d’atteinte à ces droits, l’Etat devra prendre des mesures préalables pour s’assurer une juste et équitable compensation comme l’exige la Constitution et le code minier dont l’analyse de certaines dispositions modifiées s’avère importante.
L’analyse exégétique de l’article 276 nous démontre, d’emblée, qu’en révisant l’alinéa 1 de l’article précité, la loi modificative n’a pas affecté le mécanisme sécurisé de modification du code minier quant à la procédure à suivre et l’organe compétent pour légiférer.
Contrairement à la formule originelle de l’alinéa 2 de l’article 276, la loi modificative fait état de titulaire des droits octroyés sans donner de précision qu’il s’agit des titulaires des droits miniers.
Par le fait, nous pensons que cette ambigüité entretenue par le législateur a élargi le champ des bénéficiaires de la garantie légale de stabilité à tous les titulaires des droits organisés dans le code, notamment les titulaires des droits de carrières qui ne sont pas en principe concernés.
La loi modificative réduit la durée de l’intangibilité des droits visés de 10 à 5 ans. Cette réduction exige de notre part des éclaircissements sur les bénéficiaires et le moment de l’exercice de garantie légale de stabilité et la nécessité de cette réduction. La nouvelle période de cinq ans des droits acquis garantie par la GLS s’appliquera lors des prochaines modifications du code minier. Celle de dix ans s’applique à l’entrée en vigueur de la loi modificative soit à partir du 09 mars 2018 et durera jusqu’au 08 mars 2028, pour les titulaires des droits miniers d’exploitation. Pour ceux ayant des permis de recherches en cours de validité, un peu plus tard que le 09 mars 2018.
7.1 De la nécessité
Dans la présente dissertation, la problématique de la nécessité de la révision du code minier, de manière générale, et particulièrement, en ce qui concerne la réduction de la période d’intangibilité à cinq ans, occupe une place de choix. Quant à la révision du code minier, nous pensons que l’Etat congolais, étant souverain, dispose de ce pouvoir lui reconnus par le constituant de 2006.
Cependant, nous estimons, sans peur d’être contredit, que la garantie légale de stabilité rend inutile sinon impossible toute révision du code minier. Ceci trouve une explication dans le fait qu’on ne révise une législation économique qu’avec le but de maximiser les avantages en termes des recettes déjà au lendemain de l’entrée en vigueur du code révisé. La période d’intangibilité décennale, du moins pour le cas qui est nôtre, veut que, pour les investisseurs miniers ayant les permis d’exploitation que les mêmes dispositions d’avant la révision leur soient applicables pendant une période de 10 ans, soit jusqu’en 2028 ; pour les détenteurs des permis de recherches, l’on pourra aller jusqu’à un peu plus loin étant donné que le délai de 10 court à partir de la date de transformation du permis de recherche en permis d’exploitation, c’est-à-dire que l’Etat congolais, avec les entreprises minières existantes, espérait renflouer ses caisses pas à court terme, à moyen terme, mais à une période qui dépasse le long terme.
- LA MODIFICATION DE LA GARANTIE LEGALE DE STABILITE ET SES EFFETS SUR LES PROJETS MINIERS
- Effets sur les projets miniers existants
En effet, misant sur le principe de l’immédiateté de la loi modificative, le Gouvernement entend générer le plus rapidement possible, et dans un délai raisonnable les recettes publiques par le prélèvement de plusieurs impôts et taxes particulièrement la redevance minière, en ce sens qu’elle est due, selon la loi modificative, au moment de la sortie du produit marchand du site d’extraction ou des installations pour expédition[19].
De ce qui précède, il ressort que l’Etat s’est fixé un objectif louable d’autant plus que la modification était faite dans un contexte haussier de prix de certaines substances minérales. Cependant, l’Etat et ses administrations fiscales et douanières ne peuvent pas imposer aux bénéficiaires de la GLS, spécialement aux titulaires des droits miniers en cours de validité, le prélèvement des impôts et taxes en l’occurrence la redevance minière suivant l’assiette, le taux et le moment nouvellement édictés par la loi modificative. Tous les prélèvements fiscaux et douaniers devront se faire conformément aux dispositions originelles du code minier jusqu’au 08 mars 2028 correspondant à la période d’intangibilité décennale.
Par ailleurs, MUKENDI note, dans l’une de ses pertinentes analyses sur la loi modificative, qu’il relève du sérieux d’un Etat et surtout des pratiques de la bonne gouvernance que l’Etat, par le Gouvernement de la République, respecte ses engagements légaux, la garantie légale de stabilité et l’engagement de respecter ses propres lois[20]. Il sera dès lors juridiquement non justifié pour l’Etat et ses administrations fiscales de contraindre, par des voies de fait tel que le blocage des importations pour obtenir le paiement des taxes suivant les dispositions de la loi modificative.
In casus speci, il sied de signaler que la pratique au sein des entreprises minières, considérées comme des véritables vaches laitières, est en déphasage avec ce qui est prévu dans les textes. Elles subissent une torture fiscale qui ne dit pas son nom. Des telles pratiques, bien qu’officieuses, pourront enclencher des procédures d’indemnisation notamment par la restitution des trop perçu fiscalement et par la condamnation au paiement des différentes compensations des préjudices subis pour éviter éventuellement un enrichissement sans cause au profit de l’Etat.
Aussi, sauf adhésion volontaire des bénéficiaires de la GLS, ce qui est d’ailleurs quasiment impossible, aux nouvelles dispositions de la loi modificative par la renonciation expresse, totale ou partielle au bénéfice de la garantie légale de stabilité, il est légalement difficile, si pas impossible pour l’Etat d’atteindre les objectifs de la révision dans les dix prochaines années et même un peu plus loin.
Toute chose étant égale par ailleurs, il ressort de cette analyse que la loi modificative qui fut présentée dans les médias comme une aubaine pour la population congolaise en général, et celle du Haut-Katanga en particulier est loin d’en être une. Les finances publiques continueront à stagner, car l’assiette fiscale demeure acquise pour les entreprises minières existantes pour lesquelles la modification de la garantie légale de stabilité profite et n’a pas assez d’incidence. Qu’en est-il des projets miniers futurs ?
8.2. Effets sur les projets miniers futurs
D’aucuns ignorent que la loi modificative a sensiblement affecté la garantie légale de stabilité, socle de la politique minière nationale et facteur incitatif de sécurisation et de stabilité des projets miniers.
Tout en reconnaissant le mécanisme sécurisé pour la mise en œuvre de la garantie légale de stabilité, la loi modificative a réduit l’étendue et la durée de cette garantie à 5 ans, et non plus à dix ans à l’entrée en vigueur de prochaines modifications législatives.
En effet, cette réduction exige des précisions sur les bénéficiaires et le moment de l’exercice de cette garantie.
Concernant les bénéficiaires, sans l’ombre d’aucun doute d’autant plus que la loi modificative précise que la nouvelle durée de 5 ans d’intangibilité des droits acquis s’applique aux droits, plus particulièrement aux droits miniers octroyés sous son empire. Il en résulte que la réduction à cinq ans de l’intangibilité des droits acquis garantis par la GLS concerne les prochains droits miniers qui sont octroyés à partir du 09 mars 2018, tant dis que ceux octroyés avant cette date demeurent soumis au principe des droits acquis.
Pour ce qui est du moment d’exercice, la loi modificative précise que le point de départ de la période de cinq ans court, en ce qui concerne les droits miniers à compter de l’entrée en vigueur du « présent code ». Mais les termes « présent code » sont porteur de germes de conflit. En effet, ces termes ne peuvent aucunement désigner le code minier parce qu’il était déjà entré en vigueur le 11 Juillet 2002.[21]
Pour notre part, nous pensons qu’une approche contraire signifierait que la loi modificative a rétroagi à cette date pourtant le législateur ne l’a pas voulu et ne l’a pas dit expressis verbis.
En fait, de tout ce qui précède nous nous sommes rendus compte que non seulement la garantie légale de stabilité rend inutile si pas impossible toute modification du code minier, mais surtout la réduction à 5 ans ne profite en rien aux probables investisseurs miniers et risque d’envenimer le climat des affaires déjà délétère.
Sous peine de verser dans les élucubrations amputées de tout sens objectif, les informations trouvées au ministère provincial des mines et au cadastre minier (CAMI) ont confirmé nos hypothèses.
En outre, on observe une carence d’investisseur dans ce secteur clé de notre économie. Les raisons étant de divers ordres, la réduction à 5 ans de la garantie légale de stabilité semble être prépondérante pour les miniers[22].
Pour Heenan BLAIKIE, abordant la question de l’impact de la loi modificative sur les investissements nous dira que les investisseurs nouveaux seront découragés car la durée de la période de stabilité est nettement inférieure à l’ensemble des pays de la région. Cette instabilité (révisions intempestives, introduction de dispositions rétroactives) est incompatible avec les investissements à long terme[23].
Ainsi, si avant 2002 on était à moins de 10 entreprises minières dans le Katanga, on est passé à plus de 35 entreprises après la promulgation du code minier en 2002 et après 2018 seuls 4 PR se sont transformés en PE et 7 demandes ont été enregistrées.[24]
Cette situation alarmante ne peut empêcher tout esprit critique d’émettre un point de vue et formuler certaines suggestions.
CONCLUSION
Nous avons retenu, qu’en l’absence d’une définition légale, la doctrine définit la garantie légale de stabilité comme un mécanisme mis en place par le code minier qui astreint le pouvoir public à garantir aux investisseurs privés établis sur le territoire congolais des risques divers pouvant les affecter.
Nous avons relevé que la loi modificative a affecté sensiblement la garantie légale de stabilité, socle de la politique minière nationale et facteur incitatif, de sécurisation et de stabilité des projets miniers. Nous avons noté que la modification du code minier, spécialement de la Garantie légale de stabilité est légale, légitime, conforme et nécessaire. Il s’agit de l’exercice par l’Etat des attributs de sa souveraineté. Nous avons relevé que la loi modificative ne devrait pas porter atteinte aux bénéficiaires des droits acquis garantis par la Garantie Légale de Stabilité.
En termes des suggestions, ayant constaté que l’Etat n’a pas atteint ses objectifs de maximisation des recettes deux ans après la promulgation de la loi modificative, nous avons, en ce qui nous concerne, proposé, dans un premier temps, la suppression de la garantie légale de stabilité, et dans un second temps, la reconduction du délai originel, mais aussi la réduction sensible de l’étendue de la Garantie légale de stabilité, en supprimant le régime fiscal. Cette dernière position a rencontré notre assentiment et nous la soumettons à notre propre corps défendant.
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21.NDAYWEL è Nziem, Histoire générale du Congo. De l’héritage ancien à la République Démocratique, éd. De Boeck et Larcier, Bruxelles 1998 ;
22.Olivier DAUZON, Contrats commerciaux en français et en anglais, 3ème éd., EYROLLES, Paris, 2010 ;
23.POM, guide de vulgarisation de la loi n°18/001 du 09 mars 2018 modifiant et complétant la loi n°007/2002 du 11 Juillet 2002 portant code minier, Lubumbashi, Décembre 2018 ;
24.ROMI R., Méthodologie de la recherche en Droit, éd. Lexis Nexis, Paris 2008 ;
25.SARNAUD DE NANTEUIL, Expropriation indirecte en Droit de l’investissement, éd. PEDONE, Paris, 2014 ;
26.SOLVIT S., RDC : Rêve ou illusion ? Conflit et ressources naturelles en République Démocratique du Congo, L’Harmattan, Paris, 2009 ;
III.REVUES ET ARTICLES
27.ANCEL Pascal, « Contractualisation et théorie générale du contrat : quelques remarques méthodologiques », in approche renouvelée de la contractualisation, PUAM, 2007 ;
28.Andrew Bauer, « La gestion du fonds de ressources naturelles : comment assurer des retombées pour tous », In NRGI. N°144 ;
29.Bertrand C. et alii, La fiscalité minière en Afrique : le secteur de l’or dans 14 pays de 1980 à 2015, in Revue d’Economie du développement, vol. 23 2015 ;
30.KALUNGA TSHIKALA V., Droit minier et développement durable, Thèse de doctorat en Droit, UNILU, 2002-2003 ;
IV.WEBOGRAPHIE
31.https://deskeco.com rdc-le-secteur minier, consulté le 15 janvier 2020 à 18 heures 45’.
32.ITIE RDC, Rapport annuel d’avancement pour l’année 2018, p. 94 disponible sur http://www. Itierdc. Net/news.tinfo ;
33.MBUYU Tracy, Qu’est-ce que le Droit minier ?, en ligne, https://www.legavox.frtracymbuyu, consultée le 02 mars 2020 à 20h45’
34.Magazine Jeune Afrique, un code minier à double tranchant, disponible sur https://www.jeuneqfri
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Received 20 August 2022; Accepted 5 September 2022
Available online 1 October 2022
2787-0146/© .
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KABWE SABWA H., Op.cit., p. 132 ↑
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ITIE RDC, Rapport annuel d’avancement pour l’année 2018, p. 94 disponible sur http://www. Itierdc. Net/news.tinfo ↑
-
KETA A., La clause de stabilité et la mesure fiscale de la TVA, Ed. CADEMA, Mahagi, 2016, p.27 ↑
-
MUKENDI Wa FWANA E., Article cité, p.17 ↑
-
Article 276 du code minier ↑
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Article 222 du code minier ↑
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L’exposé des motifs de la loi n°007/2002 portant code minier du 11 Juillet 2002 ↑
-
MUKENDI WA FWANA E., Article cité, p.2 ↑
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KALUNGA TSHIKALA V., Thèse citée, p. 36 ↑
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MUKENDI wa FWANA E., article cité, p. 2 ↑
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ANCEL Pascal, « Contractualisation et théorie générale du contrat : quelques remarques méthodologiques », in approche renouvelée de la contractualisation, PUAM, 2007, p. 15 ↑
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Article 276 du code minier ↑
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KABWE SABWA H., Op.cit., p. 130 ↑
-
MUKENDI WA FWANA E., Art.cit., p. 7 ↑
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ARNAUD DE NANTEUIL, Expropriation indirecte en Droit de l’investissement, éd. PEDONE, Paris, 2014, p. 5 ↑
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Article 58 de la Constitution ↑
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Article 123 de la Constitution ↑
-
MUKENDI Wa FWANA E., Article cité, p. 10 ↑
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Article 240 du code minier ↑
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MUKENDI Wa FWANA E., Article cité, p. 14 ↑
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KABWE SABWE H., Op.cit., p.216 ↑
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Mining Week 2020, Déclaration des chefs de 7 grandes entreprises minières. ↑
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IPAD, Impact du nouveau code minier de la RDC sur les opérations minières et sur l’investissement, INDABA du 09-11 Oct 2013, p.8 ↑
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Données trouvées au Cadastre Minier ↑