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HomeArticlesl’Insertion Professionnelle Des Jeunes Diplomes De l’Enseignement Superieur Et Universitaire

l’Insertion Professionnelle Des Jeunes Diplomes De l’Enseignement Superieur Et Universitaire

International Journal of Social Sciences and Scientific Studies (2022)

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l’Insertion Professionnelle Des Jeunes Diplomes De l’Enseignement Superieur Et Universitaire

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L’INSERTION PROFESSIONNELLE DES JEUNES DIPLOMES DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET UNIVERSITAIRE☆

MBAZ RUMANG Jean Claude, a *

a.Université de Lubumbashi

Received 17 August 2022; Accepted 24 August 2022

Available online 31 August 2022

2787-0146/© .

A R T I C L E I N F O

Keywords:

Insertion professionnelle

Jeunes diplômés des universités

Instituts supérieursA B S T R A C T

La présente recherche, s’inscrivant dans le domaine des ressources humaines, s’est intéressé à la notion de l’insertion professionnelle et a cherché à identifier les facteurs déterminant la faible insertion professionnelle des jeunes diplômés des universités et instituts supérieurs sur le marché de travail de Lubumbashi.

Des entretiens ont été réalisés auprès d’un échantillon de 25 individus de la ville de Lubumbashi (jeunes diplômés en emploi et candidats à l’insertion professionnelle), à l’issue desquels les résultats ont permis de définir un certain nombre des déterminants qui expliquent la faible insertion professionnelle des jeunes diplômés et qui se catégorisent en divers facteurs suivants :

  • Facteur économique et démographique : Inadéquation quantitative entre l’offre et la demande de travail (L’accroissement des effectifs diplômés, qui dépassent en nombre les emplois générés par l’économie)
  • Facteurs éducatifs : Langue internationale, stage et formation en technique de recherche d’emploi, Filière de formation
  • Facteurs sociaux : Capital social et Position sociale des parents
  • Facteur culturel : Tribalisme et ethnicisme
  • Facteur religieux : Foi religieuse
  1. INTRODUCTION

L’insertion dans la vie active des jeunes issus de l’enseignement supérieur et universitaire constitue depuis un certain nombre d’années un problème récurrent pour la société en République Démocratique du Congo. Malgré les moyens croissants mobilisés par les pouvoirs publics depuis des années, la proportion de jeunes au chômage en RD Congo ne cesse d’augmenter.

La R.D. Congo vit aujourd’hui dans un contexte de chômage de masse, dont le taux variait déjà autour de 84% en 2017 (FMI). Pour ce qui concerne les caractéristiques démographiques en RD Congo, la croissance de la population est estimée à plus de 3 % par an.

Cependant, la question de l’insertion professionnelle des jeunes de moins de 30 ans demeure préoccupante pour la RD Congo, encore que le recrutement des jeunes diplômés constitue de nos jours l’un des plus importants axes de la diversité parce que devant concourir à la performance organisationnelle (Attali, 2013).

Les efforts conjugués des pouvoirs publics, qui ne cessent d’encourager les partenaires sociaux et différents groupes à s’engager dans des stratégies de responsabilité sociétale pour favoriser l’insertion des jeunes, tout en faisant la promotion de la diversité en vue de mettre fin à toutes formes de discrimination, n’ont pas permis de donner une réponse capable d’enrayer durablement le chômage qui touche la population juvénile en grande partie.

C’est pourquoi nous avons pensé à mener une étude en contexte congolais pour mettre en lumière les difficultés d’intégration professionnelle des jeunes diplômés issus de l’Enseignement Supérieur et Universitaire (ESU) dans la ville Lubumbashi et au-delà, proposer des voies et moyens qui peuvent être mobilisés pour stimuler plus d’actions citoyennes de la part des organisations en faveur des jeunes, en vue de faciliter leur intégration dans la vie active sur un même pied d’égalité, étant donné que le travail et la protection contre le chômage sont reconnus universellement comme des droits inaliénables pour tout homme quel que soit son origine, son sexe et sa race (ONU, 1948).

La démarche a consisté d’abord à dresser un état des lieux de la situation des jeunes diplômés demandeurs d’emploi ainsi qu’à déterminer le taux d’accès à un emploi stable dans la ville de Lubumbashi. Cet inventaire a été réalisé à partir d’un échantillon de 18 organisations et 9 institutions d’enseignement supérieur et universitaire de la ville de Lubumbashi, et il met en exergue les éléments suivants :

Dans le tableau 1, il est illustré la situation des jeunes étudiants de la génération de 2015 à 2019 ayant quitté le système éducatif (c’est-à-dire les différentes institutions d’enseignement supérieur et universitaire reprises dans le tableau 1), soit un total de 16 283. En moyenne, c’est environ 3 256 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail de Lubumbashi sur cette période et tentent de s’insérer dans la vie active.

Tableau 1. Effectifs des jeunes diplômés d’universités déversés sur le marché du travail (de 2015 à 2019).

Année UNILU ISC ISS ECOPO ISES ISP ESIS UNH ISTA TOTAL
2015 801 631 462 55 139 424 190 270 2972
2016 894 615 417 80 165 419 194 125 2909
2017 994 757 368 105 231 473 207 112 3247
2018 1182 705 336 165 178 422 221 127 3336
2019 1180 1060 278 133 283 446 203 58 178 3819
TOTAL 5051 3768 1861 538 996 2184 1015 58 812 16283

Source : Nous-même à partir des données des universités et instituts supérieurs repris dans le tableau.

Le tableau 2, quant à lui, indique que la population des jeunes âgés de 30 ans et au-dessous dans les 18 organisations que nous avons visitées, ne représente qu’une infime proportion qui a pu trouver un débouché sur le marché de travail, soit 1,9 %. Il se pose donc un problème d’insertion professionnelle des jeunes diplômés dans les organisations de la ville Lubumbashi. Autrement dit, de façon générale, les organisations ne recrutent presque pas les jeunes issus de l’enseignement supérieur et universitaire, lesquels s’en trouvent par conséquent marginalisés.

Tableau 2. Proportion des jeunes diplômés âgés de 30 ans au plus dans les organisations de la ville de Lubumbashi (en 2020).

Organisations BCDC DGI GCM SNCC BOA-L’SHI FBN CNSS REGIDESO FORREST IMPALA VODACOM RTNC MALAIKA AMF SONAS BRASIMBA SOMIKA TOTAL %
Nbre Total
d’employés
45 560 6482 6855 14 18 354 296 539 56 31 135 61 28 36 604 356 16434 100%
Nbre employés
18 à 30 ans
0 0 108 56 0 1 20 0 29 3 1 5 12 3 0 39 30 343 1,9%

Source : Nous-mêmes à partir des données recueillies auprès des organisations reprises dans le tableau.

Il sied donc de constater qu’un grand fossé se creuse chaque année entre les étudiants qui terminent la formation et ceux-là qui accèdent à un emploi stable.

Cette situation de crise de l’emploi pénalise donc les jeunes et rend même leur insertion sociale difficile et très pénible à vivre pour eux et leur famille par le fait que la transition école vers la vie professionnelle devient de plus en plus longue.

Ainsi donc, au terme de cette observation, nous nous sommes posé de prime à bord la question de savoir pourquoi la proportion des jeunes diplômés recrutés, issus de l’enseignement supérieur et universitaire de la période sous étude, est sensiblement très faible dans les organisations implantées à Lubumbashi ?

Nous nous rendons explorer la littérature sur l’insertion professionnelle afin de trouver satisfaction à notre pertinente préoccupation.

2. Revue de littérature

2.1. Revue empirique

Les difficultés liées à l’insertion des jeunes sur le marché du travail ont suscité la réalisation d’importants travaux de recherche de par le monde. La plus part de ces recherches tentent d’expliquer les causes de ce phénomène. En général, ces raisons varient d’un pays à un autre.

Gilbert Coovi et Coffi Rémy (2020) ont trouvé dans leur travail les résultats qui font état, entre autres, des facteurs internes ou externes à l’origine du chômage des jeunes, des obstacles institutionnels, de l’inadéquation formation-emploi, de l’insuffisance de ressources et de créativité pour l’auto-emploi, du défaut de courage chez les jeunes pour se lancer dans l’aventure entrepreneuriale.

Omar et Soukaina (2019) ont affirmé dans leur travail que l’employabilité des jeunes constitue une préoccupation majeure au Maroc et que l’insertion professionnelle reste l’un des défis majeurs à relever au niveau national, en intégrant dans la vie active les leaders de demain. Ils ont cependant relevé que le problème réside dans l’inadéquation de l’offre et la demande ou le manque d’expérience et de compétences professionnelles des nouveaux diplômés.

Dans un document conjoint du Ministère tunisien de l’Emploi et de l’Insertion Professionnelle des Jeunes et de la Banque mondiale rédigé en Juillet 2009, il a été trouvé que les jeunes diplômés du supérieur sont relativement exposés au chômage, notamment au chômage de longue durée, sous l’effet conjugué de l’accroissement des effectifs diplômés, qui dépassent en nombre les emplois générés par l’économie pour cette catégorie, et des inadaptations entre les besoins de l’économie en compétences et la production des institutions d’enseignement supérieur. Ces déséquilibres se traduisent par l’allongement des délais d’attente avant un premier emploi et une stabilisation de plus en plus tardive dans l’emploi.

Camara et Zanou (2011) ont, dans leur étude, trouvé que la forte employabilité des jeunes à faible niveau d’instruction par rapport à ceux ayant un niveau d’instruction élevé serait due au fait que les jeunes qui ont un niveau d’instruction élevé ne sont pas disposés à exercer des petits métiers. Même s’ils exercent ce type de métiers, la plupart d’entre eux ne le déclarent pas lors des enquêtes et se considèrent comme chômeurs.

Selon l’étude de Doumbya et ses collègues (2011) réalisée en Guinée sur l’insertion socio-professionnelle des diplômés de l’enseignement supérieur, les facteurs qui influencent significativement l’accès à un emploi sont le statut des établissements de formation, la maîtrise d’une langue internationale autre que le français, le stage, la formation en technique de recherche d’emploi, la spécialité, le groupe d’âge et la position sociale des parents.

Mourji (2008) a quant à lui trouvé que les chances de trouver plus facilement un emploi sont souvent liées aux filières de formation. Les jeunes bacheliers en sciences techniques et en sciences mathématiques au Maroc ont des itinéraires universitaires plus prometteurs, du fait de leur large éventail de choix et de leur avantage comparatif pour accéder aux formations sélectives. Ces diplômés trouvent, une fois effectuées des études supérieures, plus de facilités à l’insertion.

Les résultats de Lopes et G. Thomas (2006) ont permis de voir que les difficultés d’insertion professionnelle en France sont plus importantes pour les jeunes dont le père est ouvrier que pour les enfants de cadres ou de professions intermédiaires.

Jennifer Schonholzer (2008) dans son travail sur les déterminants de l’accès à l’emploi chez les jeunes diplômés de la formation professionnelle au Maroc, est arrivé aux résultats qui démontrent que les femmes ont moins de chance d’accéder à l’emploi que les hommes. De plus, les diplômés dont le père exerce une profession de « Cadre supérieur » ou d’ « Artisan » ont une probabilité sensiblement supérieure aux autres diplômés d’accéder à l’emploi. En outre, les diplômés des niveaux de formation les plus élevés (technicien et technicien spécialisé) sont plus susceptibles de trouver un emploi que les autres, toute chose égale par ailleurs. Aussi, certains domaines de formation favorisent l’accès à l’emploi (« Bâtiments et travaux publics » et « Artisanat de services »). Enfin, l’accès à l’emploi dépend de l’opérateur de formation (université et/ou institut supérieur). Les diplômés de certains opérateurs publics ont plus de chance d’accéder à l’emploi que ceux formés par les centres privés.

Mamadou Kani Konaté (2017), dans son Enquête sur l’insertion professionnelle des diplômés de l’enseignement supérieur au Mali, souligne que les principaux déterminants du chômage des diplômés sont le sexe, le statut matrimonial, la filière et la mention du diplômé. Les femmes ont plus de chance d’être au chômage que les hommes. Les célibataires ont plus de chance d’être au chômage que les polygames. Les diplômés des filières sciences et techniques ont moins de chance d’être au chômage que ceux des filières sciences humaines et sociales, sciences juridiques et langues. Enfin, les résultats montrent que les diplômés ayant obtenu des mentions assez-bien et bien ont plus de chance d’être au chômage que les diplômés admis avec la mention passable. Ce résultat corrobore le fait que les relations sociales (ou le capital social) jouent davantage dans l’obtention de l’emploi que l’excellence académique.

Enfin, pour toujours parler du capital social, Il existe un large consensus dans la littérature selon laquelle les méthodes de recherche informelles, telles que les contacts personnels, sont meilleures que les méthodes de recherche formelles pour transférer des informations détaillées.

Eliason et al (2019) documentent le rôle causal d’un large éventail de liens sociaux (par exemple, membres de la famille, anciens collègues, anciens camarades de classe et voisins actuels). En se concentrant sur l’impact des relations sociales sur l’embauche, les auteurs ont trouvé que les membres de la famille sont les plus importants de tous les liens sociaux mesurés. Les anciens collègues sont également importants, et en particulier s’ils ont travaillé ensemble relativement récemment. Cappellari et Tatsiramos (2015), à partir des bases de données longitudinales de l’Enquête britannique par panel auprès des ménages (BHPS) constatent, qu’une meilleure qualité de réseau grâce à un plus grand nombre d’amis employés augmente le taux d’obtention d’emploi. Ils trouvent qu’un ami supplémentaire employé augmente la probabilité de transition du non-emploi à l’emploi de 3,1 % ou de 15%.

Après exploration des études empiriques, il sied de présenter également la revue des théories explicatives de l’insertion professionnelle.

2.2. Les fondements théoriques de l’insertion professionnelle

Cette recherche sur l’insertion professionnelle des jeunes est structurée autour de trois théories, notamment la théorie du filtre, la théorie de recherche d’emploi ainsi que la théorie du capital social.

2.2.1. La théorie du filtre

Cette théorie est considérée comme étant un prolongement de la théorie du capital humain. Michael Spence (1974) qui est présenté comme l’un des principaux promoteurs, fait l’hypothèse que les études ne sont pas un investissement pour augmenter le capital humain mais un simple moyen de sélection. L’éducation n’aurait pas pour effet d’augmenter la productivité de l’agent mais de sélectionner les agents qui sont déjà et seront les plus productifs. Ce qui remet en cause la rentabilité sociale d’une éducation qui comporte des coûts importants sans pour autant améliorer la productivité des travailleurs. Le diplôme obtenu est donc simplement un signal pour l’employeur, c’est une preuve que l’agent est meilleur que les autres et qu’il a été sélectionné.

2.2.2. La théorie de recherche d’emploi

Cette théorie aide à mieux comprendre l’attitude des demandeurs d’emploi sur le marché du travail. Elle a été développée par George Stigler dans les années 1960, parfois appelée : « théorie du Job search ». Elle permet d’expliquer la coexistence entre un chômage volontaire et un chômage involontaire.

Dans un premier temps, les chercheurs d’emploi font un arbitrage entre les offres d’emplois qui leur sont proposées et le fait de rester au chômage. Ils ne se décident à occuper ces emplois que si le montant du salaire qui leur est proposé est supérieur à l’espérance mathématique (c’est-à-dire la moyenne) du salaire que l’on pourra leur proposer plus tard. Le niveau de salaire qui détermine s’il est plus avantageux pour le travailleur d’entrer sur le marché du travail (sortir du chômage) est appelé « salaire de réservation ». On peut ainsi parler d’un chômage volontaire. En d’autres termes, le travailleur reste au chômage tant que le bénéfice marginal qu’il retire des offres d’emploi qui lui sont proposées demeure inférieur au bénéfice marginal qu’il a à rester au chômage, dans l’attente d’offres meilleures. La rémunération au-dessous de laquelle le travailleur va décider d’entrer dans l’inactivité (de passer du statut de chômeur au statut d’inactif) est appelé « salaire de réserve ».

Dans un second temps, le chômage involontaire succède au chômage volontaire, les chômeurs recherchant à tout prix un emploi.

Pour certains, le taux élevé du chômage chez les femmes s’expliquerait en partie par cette théorie. Le coût du chômage (absence de salaire) étant moins lourd pour les femmes dont le mari travaille et pour les jeunes entretenus par leur famille, ceux-ci seraient moins pressés d’obtenir un emploi.

2.2.3. Théorie du capital social

Loury est l’économiste qui a introduit le concept du capital social en économie (Plasman, 2006). Cependant, les véritables bases de la définition et de la conceptualisation du capital social ont été jetées à partir des années 1980 par Pierre Bourdieu (1980) et James Coleman (1988).

Dans la littérature théorique l’on décèle deux grandes conceptions du capital social : les approches du capital social comme un bien privé et les approches du capital social comme bien public. L’approche bien privé du capital social est cernée par trois principales dimensions : La force des liens (Granovetter, 1973), la structure du réseau (Burt, 1992) et la nature des ressources accessibles (Lin, Vaughn, & Ensel , 1981). Dans l’approche bien public, le capital social est considéré comme un actif détenu collectivement (Coleman, 1988).

Toujours sur le plan théorique, les auteurs assignent trois rôles principaux au capital social sur le marché du travail. Ce sont : la transmission de l’information sur le marché du travail, la sélection de candidats à l’embauche pour les employeurs, les effets de pairs, et effet de népotisme. En revanche, la théorie qui soutient notre analyse est celle de Calvo-Armengol et Jackson (2004).

Selon cette théorie, l’usage des réseaux sociaux à des implications sur les inégalités sur le marché du travail et leur persistance. De ce fait, les auteurs considèrent un modèle ou les travailleurs peuvent obtenir des informations sur les offres d’emplois grâce à leur réseau, la structure de celui-ci étant modélisée de manière explicite par un graphe. Considérons deux agents i et j. Supposons qu’ils soient initialement au chômage et que j obtienne un emploi. En devenant employé, il devient une source d’information éventuelle pour i sur les offres d’emploi. La probabilité pour i de devenir à son tour employé s’en trouve accrue. A l’inverse, un travailleur qui ne serait lié qu’à des chômeurs a peu de chances de trouver un emploi puisque son réseau est alors totalement inefficace dans la recherche d’un emploi.

Cette corrélation entre les statuts induit donc une persistance des niveaux de chômage au sein des réseaux. Les réseaux où le taux de chômage est initialement important auront beaucoup de difficultés à améliorer leur situation, le canal informel étant inefficace. Cependant, si les réseaux sont identiques, cette inégalité des taux d’emploi disparaît à long terme. Si les réseaux sont dissymétriques, les distributions de revenus et d’emploi dans chacun des réseaux seront par contre différentes et ce de manière persistante.

L’agencement de liens peut être plus ou moins efficace dans la transmission de l’information (ce qui renvoie au problème d’efficacité précédemment évoqué) et donc conduire, au sein du réseau, à un taux de chômage plus ou moins grand et à des niveaux de salaires plus ou moins élevés.

Dans un tel cadre, l’employabilité du point de vue du capital social est source d’inégalité. En effet en permettant aux individus du même réseau d’atteindre facilement leurs buts, il exclut les individus en dehors du groupe n’ayant pas accès à un capital social de qualité. Cette situation est source d’exclusion sociale pour la majorité des jeunes qui, n’ayant pas de connaissances, se retrouvent cantonnés dans des emplois précaires ou restent plusieurs années dans leur situation de chômage. Ceci est susceptible de réduire leur chance d’accès à un emploi. A long terme cela pourrait aggraver la pauvreté de la population.

Nous allons à présent démontrer dans quelle mesure notre recherche s’écarte de celles de nos prédécesseurs.

2.3. Particularité

Chaque auteur, dans la revue empirique présentée ci-haut, a essayé de lister un certain nombre des facteurs favorisant ou freinant l’insertion professionnelle des jeunes.

Pour notre part, nous allons considérer et regrouper les différents facteurs repris par tous les auteurs et qui s’adaptent au contexte de la RDC (et à celui de la ville de Lubumbashi en particulier) en vue de les tester, dans le souci d’apporter une pierre à l’édifice en ce qui concerne la résolution du problème d’insertion des jeunes qui se pose.

L’originalité de la présente étude tient aussi au fait que nous allons considérer le tribalisme et la religion comme aussi des potentiels déterminants de l’insertion professionnelle, ce qu’aucun auteur n’a pris le soin de faire jusque-là, à notre connaissance et d’après la littérature explorée.

2.4. Question de recherche

Au regard des éléments recueillis lors de notre enquête qui nous ont permis de faire l’observation du phénomène, et après exploration de la littérature en rapport avec notre thématique, nous nous sommes proposé de formuler la question centrale de la recherche de la manière suivante :

:

Quels sont les facteurs déterminant la faible insertion professionnelle des jeunes issus de l’enseignement supérieur et universitaire à Lubumbashi ?

2.5. Hypothèses de recherche

L’hypothèse étant une explication provisoire de la corrélation entre variables ou une réponse provisoire à la question de recherche, nous pouvons répondre notre question de recherche en supposant que la faible insertion professionnelle des jeunes issus de l’ESU serait déterminée par des facteurs d’ordre institutionnel, économique, individuel, éducatif, démographique, social, culturel et religieux.

Voici à présent ci-dessous, le modèle conceptuel ou la représentation schématisée de la réalité en rapport avec notre étude, qui relie les différentes variables explicatives à la variable expliquée qu’est l’insertion professionnelle des jeunes diplômés de l’ESU.

Figure 1 : Modèle théorique explicatif

Variables indépendantes Variable dépendante Y

Facteurs institutionnels

  • Inadéquation Formation-Emploi
  • Statut des établissements de formation

Facteur économique et démographique

  • Inadéquation quantitative entre l’offre et la demande de travail (L’accroissement des effectifs diplômés, qui dépassent en nombre les emplois générés par l’économie)

Facteur individuel

  • Indisponibilité des jeunes issus de l’ESU à exercer des petits métiers

Facteurs éducatifs

  • Langue internationale, stage et formation en technique de recherche d’emploi
  • Filière de formation

Facteurs sociaux

  • Position sociale des parents
  • Capital social

Facteur culturel

  • Tribalisme et ethnicisme

Facteur religieux

  • Foi religieuse

Insertion professionnelle des jeunes diplômés

X

Source : Nous-même, à partir de la revue de littérature et de nos hypothèses de recherche.

3. Méthodologie de recherche

Tout chercheur scientifique, même débutant, est supposé produire des connaissances valables et être sans cesse en mesure d’expliquer la façon dont il les a produites. Cela passe par la présentation de la posture épistémologique et des procédés méthodologiques.

Ainsi, sur le plan épistémologique, le paradigme positiviste[1] a été utilisé dans cette recherche. Cela est justifié par le fait qu’après avoir observé le problème lié à l’insertion professionnelle des jeunes issus de l’enseignement supérieur et universitaire à Lubumbashi, nous avons cherché à en connaitre les facteurs explicatifs. Le mode de raisonnement auquel nous avons recouru est celui hypothético-déductif[2].

Pour ce qui est de l’approche méthodologique, nous avons recouru à celle qualitative qui nous a permis, au moyen des entretiens, d’obtenir des informations en rapport avec la question centrale de la recherche et ainsi vérifier nos hypothèses.

S’agissant de la collecte et analyse des données, plusieurs méthodes et techniques ont été mobilisées parmi lesquelles, la méthode d’étude de cas, la technique d’entretien, la technique d’analyse documentaire et finalement, la méthode d’analyse du contenu qui nous a permis, au moyen du logiciel TROPES, de traiter les données recueillis auprès des personnes interviewées.

4. Résultats

Dans cette partie, nous allons présenter les résultats issus du traitement des informations obtenues auprès d’un échantillon par choix raisonné de 25 diplômés de l’ESU vivant à Lubumbashi, dont 17 avaient entre 20 et 25 ans d’âge, 6 avaient entre 26 et 30 ans et 2 avaient plus de 30 ans.

Parmi ces 25 diplômés, il y avait 17 hommes et 8 femmes, 3 gradués, 16 licenciés, 6 Masters. Et pour ce qui est du statut matrimonial, il y avait 22 célibataires et 3 mariés.

Voici à présent les résultats obtenus après analyse thématique du contenu des entretiens via le logiciel TROPES :

Figure 2 : Graphe étoilé

Source : Nous-même, sur base des données des entretiens traitées au moyen du logiciel TROPES.

Ce graphe présente les degrés de relations ente la variable dépendante (insertion professionnelle des jeunes diplômés d’universités) et les variables indépendantes qui l’influencent. Ainsi, comme nous pouvons le voir, il existe un lien ou des liens entre les onze variables explicatives et le problème lié à la faible insertion professionnelle des jeunes issus de l’enseignement supérieur et universitaire à Lubumbashi (ESU). Mais ces relations conduisent-elles à dire que toutes les onze variables expliquent réellement le problème ? Nous osons croire que les tableau et graphique qui suivent (et qui présentent des proportions en pourcentage) sont mieux placés pour permettre de donner réponse à cette question qui vient d’être posée.

Tableau 3 : Proportion des variables justificatives de la faible insertion professionnelle des jeunes issus de l’ESU

Variables Correlation %
Capital social 24 20%
Position sociale des parents 21 17%
Tribalisme et ethnicisme 18 15%
Stage et formation en technique de recherche d’emploi 12 10%
Filière de formation 11 9%
Langue internationale 9 7%
Foi religieuse 9 7%
Inadéquation quantitative entre l’offre et la demande de travail 8 7%
Indisponibilité des jeunes issus de l’ESU à exercer des petits métiers 5 4%
Statut des établissements de formation 3 2%
Inadéquation formation-emploi 1 1%
Total 121 100%

Source : Nous-même, à partir des résultats produits par le logiciel TROPES.

Le tableau ci-haut présente les différentes variables explicatives et les proportions dans lesquelles elles expliquent le problème.

Il nous permet de conclure que les trois dernières variables expliquent très faiblement le problème par rapport aux autres. Premièrement, l’indisponibilité des jeunes issus de l’ESU à exercer des petits métiers, a présenté un degré d’explication du problème faiblement significatif, et nous pensons que c’est à cause du fait que les jeunes diplômés qui ont été interviewés vivent dans la ville de Lubumbashi qui s’avère être un contexte caractérisé par un chômage involontaire élevé et où les candidats potentiels sont prêts à travailler pour n’importe quel salaire qui pourrait leur être proposé mais ne trouvent pas d’emploi.

Ensuite, le statut des établissements de formation s’est révélé ne pas avoir d’influence significative sur le problème lié à l’insertion des jeunes ; c’est-à-dire que le fait de provenir d’un établissement public ou privé ou le fait d’avoir obtenu une formation de qualité faible (Inadéquation formation-emploi) n’est pas du tout un facteur explicatif de la faible insertion des jeunes. Cela est évident puisque l’environnement lushois dans lequel l’étude a été mené est caractérisé par un taux élevé de tribalisme et d’ethnicisme, et l’obtention de l’emploi passe généralement par des recommandations (Capital social et Position sociale des parents).

Figure 3 : Cartographie des thèmes

Source : Nous-même, sur base du tableau précédent.

Ce graphique illustre également les différentes proportions des variables explicatives reprises dans le tableau qui a précédé.

Bref, après avoir confronté les théories à la réalité sur terrain, trois hypothèses ont été infirmées ; il s’agit notamment de l’indisponibilité des jeunes issus de l’ESU à exercer des petits métiers, du statut des établissements de formation et de l’inadéquation formation-emploi. Et toutes les autres ont été confirmées.

6. Discussion

Nous ne sommes, en effet, pas les premiers à mener une étude sur l’insertion professionnelle des jeunes diplômés d’universités. Nous avons présenté, dans la revue empirique, bon nombre d’études qui ont aussi traité de cette question. Et nos résultats corroborent la plupart de ceux de nos prédécesseurs qui ont également trouvé comme déterminants de la faible insertion professionnelle des jeunes : le capital social et la position sociale des parents (Doumbya et al., 2011 ; Jennifer Schonholzer, 2008 ; Lopes et G. Thomas, 2006 ;
Mamadou Kani Konaté, 2017 ; Eliason et al., 2019 ; Cappellari et Tatsiramos, 2015), le stage, la formation en technique de recherche d’emploi, la filière de formation et la langue internationale (Doumbya et al., 2011 ; Mourji, 2008 ; Jennifer Schonholzer, 2008 ; Mamadou Kani Konaté, 2017), l’inadéquation quantitative entre l’offre et la demande de travail (Doumbya et al., 2011 ; Document conjoint du Ministère tunisien de l’Emploi et de l’Insertion Professionnelle des Jeunes et de la Banque mondiale rédigé en Juillet 2009).

Toutefois les résultats de nos investigations se sont avérés être opposé à ceux de Gilbert Coovi et Coffi Rémy (2020), Omar et Soukaina (2019), Camara (2011), Doumbya et al. (2011), qui ont trouvé comme facteurs de la faible insertion des jeunes, l’indisponibilité des jeunes issus de l’ESU à exercer des petits métiers, le statut des établissements de formation ainsi que l’inadéquation formation-emploi.

En dehors des variables figurant dans les études de nos ainés, nous avions aussi sélectionné, par rapport à notre contexte, deux autres variables qui, après traitement des données, se sont également avérés être des déterminants de la faible insertion professionnelle des jeunes diplômés lushois de l’ESU ; il s’agit de la religion (ou l’appartenance à une foi religieuse) et du tribalisme (ou ethnicisme) qui constitue une forme spécifique de capital social.

Conclusion

Nous voici arrivé à la fin de notre recherche intitulée : « l’insertion professionnelle des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur et universitaire ».

L’étude est partie d’une observation selon laquelle il y a chaque année beaucoup des jeunes diplômés universitaires lushois qui quittent le système éducatif vers le marché de travail, mais qui ne sont que faiblement représentés dans les organisations de la ville de Lubumbashi, alors que la théorie du capital humain annonce que des niveaux élevés d’éducation améliorent les chances d’obtenir un emploi (Gary, 1964).

La question de recherche se présentait comme suit : Quels sont les facteurs déterminant la faible insertion professionnelle des jeunes issus de l’enseignement supérieur et universitaire à Lubumbashi ?

Nous avions répondu provisoirement en supposant que la faible insertion professionnelle des jeunes serait déterminée par des facteurs d’ordre institutionnel (l’inadéquation Formation-Emploi et le statut des établissements de formation), économique et démographique (l’inadéquation quantitative entre l’offre et la demande de travail c’est-à-dire, l’accroissement des effectifs diplômés qui dépassent en nombre les emplois générés par l’économie), individuel (l’indisponibilité des jeunes issus de l’ESU à exercer des petits métiers), éducatif (la langue internationale, stage et formation en technique de recherche d’emploi, la filière de formation), social (la position sociale des parents, le capital social), culturel (le tribalisme et l’ethnicisme) et religieux (la foi religieuse).

En vue de vérifier ces hypothèses, nous avions recouru à l’approche qualitative avec la méthode d’étude de cas, la technique d’entretien, la technique d’analyse documentaire ainsi que la méthode d’analyse de contenu qui a facilité le traitement des données en rapport avec les entretiens.

Après collecte et traitement des données, les résultats ont montré que les facteurs déterminant faible insertion professionnelle des jeunes diplômés de l’ESU sont notamment, le capital social, la position sociale des parents, le tribalisme et ethnicisme, le stage et formation en technique de recherche d’emploi, la filière de formation, la foi religieuse ainsi que l’inadéquation quantitative entre l’offre et la demande de travail.

Du point de vue de la proposition des solutions, de nouvelles politiques et de nouveaux programmes devraient être implantés par les autorités concernées tout en considérant les différents facteurs de la faible insertion qui ont pu ressortir des résultats de la présente recherche. Nous ne pouvons qu’espérer que ces nouvelles connaissances mises en lumière par la présente étude seront utilisées par des personnes ressources et qu’elles permettront de diminuer drastiquement le chômage pour les jeunes diplômés issus de l’enseignement supérieur et universitaire à Lubumbashi.

Le champ ouvert par la présente recherche est vaste. Nous avons utilisé la technique d’entretien qui présente généralement des faiblesses en termes de généralisation. Des futurs chercheurs désireux de mener des études dans le même sens et sur le même thème que nous pourraient recourir à l’enquête par questionnaire et considérer des échantillons considérables et représentatifs qui permettraient de mieux généraliser les résultats.

Nous n’avons pas étudié l’insertion professionnelle dans sa globalité, nous avons juste apporté une pierre à ce qui avait déjà été dit par nos prédécesseurs. Néanmoins, nous pensons aussi avoir conduit notre étude à constituer une référence et un guide pour le monde scientifique.

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Université de Lubumbashi

* Corresponding author at: .MBAZ RUMANG Jean Claude

Jcmbazrumang@gmail.com

Received 17 August 2022; Accepted 24 August 2022

Available online 31 August 2022

2787-0146/© .

  1. Le projet du positivisme est d’expliquer une réalité (Thiétart & al., 2014)..
  2. La démarche hypothético-déductive consiste, en effet, à formuler une ou plusieurs hypothèses et à les confronter à la réalité (Charreire & Durieux, 2007). Cette démarche est fondée sur le raisonnement déductif. La déduction est un moyen de démonstration qui permet d’expliquer et de prédire à partir de la théorie (Charreire & Durieux, 2007). La démarche hypothético-déductive consiste à élaborer à partir de la littérature des hypothèses, des modèles ou des théories, qui correspondent au sujet étudié, et qui vont être testées. Cette phase de test va permettre de réfuter ou non ces hypothèses, modèles ou théories.