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LA LIBERTE DE LA PRESSE ET SES LIMITES EN DROIT CONGOLAIS

Date:

MAKOLO MAKOPO Célestin

Assistant à la Faculté de Droit au département de Droit Public, Université de Lubumbashi ;

KABANDA MASHINI Justin

Assistant à la Faculté de Droit au département de Droit Public, Université de Lubumbashi.

Mots clés :

Liberté, Presse, Droit Congolais

Résumé

La liberté de presse est un droit fondamental parmi tant d’autres, consacré tant par les instruments juridiques internationaux que nationaux.

En République Démocratique du Congo, cela est reconnu par la constitution du 18 février 2006 telle que révisée à ce jour, dans son titre relatif aux droits humains et libertés fondamentaux ainsi que, par la loi règlementant le secteur de la presse. Nonobstant cette consécration, la liberté de presse est violée tant par les bénéficiaires et les pouvoirs publics. C’est ainsi que, dans le cadre de cette recherche, il est demandé et aux pouvoirs publics et aux bénéficiaires de la liberté de presse, de respecter les règles juridiques en la matière.

i. Approches introductives

Chaque année, nous célébrons le 03 mai la journée mondiale de la liberté de la presse. Depuis 1994, cette journée permet chaque année de souligner les attentes à la liberté de la presse et de rappeler l’importance d’une presse libre et indépendante pour une démocratie. L’organisation « Reports sans frontières » Publie chaque année en avance un rapport qui analyse la situation de la liberté de la presse dans le monde entier.

Dans de nombreux pays, le paysage médiatique est en plein évolution. En effet, des géants de l’expression meurent et de nouveaux petits médias voient le jour un peu partout.

Comme les autres nations, la République Démocratique du Congo a consacré une place de choix aux droits et libertés fondamentaux[1]. Cela peut, nous semble-t-il, s’expliquer par son attachement aux instruments internationaux régulièrement ratifiés par elle. Nous citons, notamment, la Déclaration Universelle des droits de l’Homme, le Pacte international relatif aux Droits Civil et Politique ainsi que la charte Africaine des droits de l’Homme et de Peuples.

La liberté de la presse figure parmi les droits et liberté fondamentaux des citoyens, de par la liberté d’expression, le législateur Congolais fixe les modalités de son exercice et la défini comme suit : « … par la liberté d’opinion et d’expression, il faut entendre le droit d’informer, d’être informé, d’avoir ses opinions ses sentiments et de de les communiquer sans entrave, quel que soit le support utilisé… »[2]. De cette définition de l’exercice de la liberté de presse, le législateur en fixe tout de même des limites qui sont principalement le respect de la loi, de l’ordre public, de droit d’autrui et des bonnes mœurs. Il appert ainsi que, la liberté qui accompagne le professionnel de la presse, dans l’exercice de ses activités, est cependant délicate[3]. Elle est limitée par de droits et liberté aussi fondamentaux qu’elle. Par conséquent, les mesures pouvant limiter la liberté de la presse doivent être une loi[4] ; en ce sens que les titulaire de cette liberté doivent préalablement connaitre la façon dont ils doivent se conduire.

Certes, il existe une loi fixant les modalités d’exercice de la liberté de presse, mais avec l’évolution de nouvelle technologie de l’information et de la communication, il sied de signaler que, les médias audiovisuels et les médias en ligne[5] n’exercent pas cette liberté dans le strict respect de la loi.

Ceci revient à dire bien que, la liberté de la presse soit un droit reconnu à tout individu, il cependant tempéré, car l’on ne peut pas l’user s’il porte atteinte aux droits d’autrui. Ce respect constitue ainsi les limites au droit de liberté de la presse. Dans le souci de connaitre ces différentes limites, nous avons intitulé notre sujet de recherche : la liberté de la presse et ses limites en droit Congolais.

C’est sur ce sujet que nous allons étendre nos cherches dans les lignes qui suivent. Il est aussi important d préciser que ce sujet a été déjà plus d’une fois fait objet d’étude.

II. Exercice de la liberté de presse en République Démocratique du Congo

La liberté de la presse, reste un droit d’informer en toute liberté et celui d’être informé tout aussi librement, découlant d’un parmi les droits fondamentaux de l’homme car prescrit tant par les instruments juridiques nationaux qu’internationaux.

II.1. Liberté de la presse

Dans cette section nous analyserons successivement trois paragraphes : le premier sera axé à la définition de la liberté de la presse, le deuxième traitera des éléments constitutifs de la liberté de la presse enfin le troisième paragraphe étudiera la typologie et nature d’atteintes à la liberté de presse.

II.1.1. Définition de la liberté de la presse

La liberté de la presse[6] est l’une des principales libertés publiques. C’est une condition nécessaire à l’exercice de la démocratie. Elle participe du droit d’expression et de critique dont disposent tous les citoyens vivant dans les pays démocratiques. Mais l’obtention de ce droit a demandé de longs combats. Aujourd’hui encore, cette liberté ne concerne qu’une minorité de pays. Cependant, même dans les pays démocratiques, la liberté de la presse doit composer avec les réalités économiques. Elle est l’un des principes fondamentaux des systèmes démocratiques qui repose sur la liberté d’opinion, la liberté mentale et d’expression[7].

Selon l’article 8 de la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de presse, la liberté de presse est entendue comme le droit d’être informé, d’avoir ses opinions, ses sentiments et de les communiquer sans aucune entrave, quel que soit le support utilisé, sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public, des droits d’autrui et des bonnes mœurs[8].

II.1.2. Eléments constitutifs de la liberté de la presse

Par éléments constitutifs de la liberté de la presse, il faut comprendre les différentes notions qui composent et accompagnent l’exercice de cette liberté. Le présent point analyse ces éléments, du point de vue des professionnels de la presse d’une part, et d’autre part, du point de vue du public.

A. La liberté de la presse du point de vue des professionnels de la presse

Par professionnel de la presse, il faut entendre toute personne œuvrant au sein des catégories de métier et se vouant d’une manière régulière à la collecte, au traitement, à la production, à la diffusion de l’information et des programmes, à travers un organe de presse et qui titre l’essentielle de ses revenus de cette profession. De cette définition, il ressort quelques éléments constitutifs :

1. La collecte des informations

Elle marque le point de départ de l’exercice de la liberté l’expression par les professionnels des médias. Elle consiste à recueillir des faits sociaux de tout genre en vue de leur traitement[9].

2. Le traitement des informations

Lorsqu’un journaliste collecte les informations, celles-ci sont toujours dans une situation brute. Ainsi, en vue d’éviter la déformation des faits, il est tenu de leur donner un sens plus réaliste ; et ce, en utilisant parfois l’euphémisme pour une bonne production.

3. La production de l’information

Elle permet aux professionnels des médias en général ; et aux agences de presse en particulier, d’assurer la réalisation matérielle des informations collectées en vue de leur diffusion. La production des informations peut être réalisée à titre onéreux aux fins de leur diffusion.

4. La diffusion des informations

La diffusion des informations est le droit de propager des faits ainsi que des idées collectées. Il est le corollaire de la liberté de pensée[10] ; en ce sens qu’elle consiste à dire ce que l’on pense ou ce que l’on sait, en privé ou dans les médias. L’élément clé qui apparait, parmi les éléments cités à titre indicatif, est l’information.

5. L’information

Etymologie : du latin informare, façonner, former. L’information est l’action d’informer, de s’informer, de donner la connaissance d’un fait ou de la rechercher. Exemple : la presse d’information.

En informatique et en télécommunication, l’information est un élément de connaissance (voix, donnée, image) susceptible d’être conservé, traité ou transmis à l’aide d’un support et d’un mode de codification normalisé[11].

En communication, l’information est entendue comme des faits, des données ou des messages de toutes sortes mis à la disposition du public par voie de la presse écrite ou de la communication audiovisuelle[12].

6. Le droit à l’information[13]

Le droit à l’information qui autrefois était une théorie soutenue par la doctrine, est actuellement consacré par la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006. S’analysant comme l’un des éléments constitutifs de la liberté de la presse, du point de vue du journaliste ou professionnel de la presse, le droit à l’information implique la prérogative d’informer. L’Etat a l’obligation d’assurer et de rendre effectif ce droit.

Cependant, dans la collecte, le traitement, la production ainsi que la diffusion de l’information, le journaliste doit facilement accéder aux sources.

7. Le libre accès aux sources d’informations

Au nom de la liberté de la presse, le journaliste est libre d’accéder à toutes les sources d’informations[14]. Par source d’informations, il faut entendre l’origine des faits, des données ou des messages auxquels le journaliste se réfère pour mettre les informations à la disposition du public. Le libre accès aux sources d’informations implique le devoir de vigilance. En effet, le devoir de vigilance de la presse correspond aux droits particuliers de cette dernière. En d’autres mots, elle doit fournir des informations qui soient les plus véridiques possibles. Le professionnel de la presse est ainsi tenue de vérifier, avant de les diffuser, toutes les informations eu égard à leur véracité, leur contenu et leur origine.

B. Du point de vue du public

La liberté de la presse, du point de vue du public, est constituée du droit à l’information. Mais ce dernier s’analyse comme le droit du public d’être informé[15]. Le public a donc le droit de recevoir une information de qualité ; c’est-à-dire l’information qui respecte l’ordre public et les bonnes mœurs. Cela ressort clairement de l’article 9 alinéa 8 de la loi organique portant composition, attribution et fonctionnement du CSAC.

En effet, dans ses attributions, le CSAC est appelé, notamment, à veiller à la qualité des productions des médias du secteur de l’audiovisuel tant public que privé et en promouvoir l’excellence[16].

Avec l’avancé de nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’Internet, via les réseaux sociaux, s’est ajouté à la liste des médias. Vu les effets pervers de ce dernier Internet, le législateur a confié au CSAC la mission de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de protéger les enfants des effets néfastes et pervers de l’Internet[17].

II.2. Les organes charges d’assurer le respect de la liberté de presse

II.2.1. Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication

A. Objet, nature et siège du CSAC

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication, CSAC[18] en sigle, est une institution d’appui à la démocratie. Il est indépendant, autonome et doté de la personnalité juridique. Son siège du Conseil est établi à Kinshasa[19], capitale de la République Démocratique du Congo. En cas de circonstances exceptionnelles empêchant le Conseil de se réunir à son siège habituel, l’Assemblée plénière peut décider du lieu qui abritera provisoirement ses travaux. Le siège du Conseil ainsi que ses bureaux de représentation en province sont inviolables, sauf dans les cas prévus par la loi et dans les formes qu’elle prescrit.

B. Fonctions principales du CSAC

Quoique la République Démocratique du Congo ne possède qu’une seule autorité contrôlant la diffusion et la distribution des signaux et que différentes lois établissent certaines autorités de régulation, il reste cependant clair que le véritable pouvoir de contrôle sur les médias réside auprès de l’autorité exécutive du gouvernement ; plus précisément auprès du Ministre chargé de la Presse et de l’Information. En effet, le travail du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication au côté de l’Autorité de régulation, lequel contrôle les aspects techniques de la diffusion médiatique, demeure éclipser par les attributs ministériels exercés par le pouvoir exécutif malgré la conception constitutionnelle du Conseil.

Ce qui nous renvoi à étudier les fonctions principales en tant que Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication d’une part, et d’autre par ses fonctions en tant qu’autorité de régulation.

C. Fonctions en tant que CSAC

Les articles 8 et 10 de la Loi n° 11/001 décrivent les fonctions principales[20] du CSAC comme suit :

  • Garantir la liberté de la presse, de l’information et des moyens de communication des masses ;
  • Faire respecter la déontologie en matière d’information ;
  • Veiller sur l’accès équitable des partis politiques, des associations et de toute autre personne aux moyens officiels d’information et de communication ;
  • Elaborer son Règlement intérieur ;
  • Assurer une médiation en cas de conflit dans le domaine des médias ;
  • Promouvoir l’excellence des productions médiatiques ;
  • Veiller à la diffusion de la culture de la paix, de la démocratie, des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
  • Valoriser la culture nationale à travers les médias ;
  • Veiller à la protection de l’enfant ;
  • Présenter un rapport périodique et annuel ainsi que des avis techniques au Parlement sur les projets ou propositions de lois relatifs aux médias.

D. Fonctions en tant qu’autorité de régulation

Selon l’article 8 de la loi cadre n°013-2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications en République Démocratique du Congo, l’autorité de régulation est un service public dotée de la personnalité juridique. De ce fait, elle a pour attributions[21] de:

  • Veiller au respect des lois, des règlements et des conventions en matière des télécommunications ; instruire les dossiers de demande de concession, délivrer les autorisations, recevoir les déclarations, établir les cahiers des charges correspondant aux autorisations et veiller à ce que les obligations contractées par leurs titulaires soient respectées ;
  • Procéder aux homologations requises par la présente loi ;
  • Définir les principes d’interconnexion et de tarification des services publics de télécommunications ;
  • Gérer et contrôler le spectre des fréquences ;
  • Elaborer et gérer le plan national de numérotation ;
  • Analyser et étudier de façon prospective l’évolution, aux plans national et international, de l’environnement social, économique, technique et juridique des activités du secteur ;
  • Contribuer à définir et à adapter, conformément aux orientations de la politique gouvernementale, le cadre juridique général dans lequel s’exercent les activités relevant du secteur des télécommunications.

E. Composition du CSAC

Le Conseil est composé de quinze membres désignés de la manière suivante :

  • Un membre par le Président de la République ;
  • Deux membres par l’Assemblée nationale ;
  • Deux membres par le Sénat ;
  • Un membre par le Gouvernement ;
  • Un membre par le Conseil Supérieur de la Magistrature ;
  • Trois membres par les associations des professionnels des médias, à raison d’un membre pour chaque secteur d’activité, à savoir : la radiodiffusion sonore, la télévision, la presse écrite ;
  • Un membre représentant du secteur de la publicité ;
  • Un membre par le Conseil national de l’ordre des avocats ;
  • Un membre par les associations des parents d’élèves et d’étudiants, légalement constituées;
  • Deux membres par les associations de défense des droits des professionnels des médias, légalement constituées.

Notons par ailleurs que, cette désignation tient compte de l’expertise dans le secteur des médias, de la représentation nationale ainsi que de celle de la femme.

F. Les organes et fonctionnement du CSAC

Les organes du Conseil sont :

  • L’Assemblée plénière ;
  • Le Bureau ;
  • Les Commissions permanentes ;
  • Les Coordinations provinciales.

II.2.2. L’Union Nationale de la Presse Congolaise

A. Nature juridique

L’Union nationale de la presse congolaise (UNPC) est une organisation indépendante de soutien aux journalistes en République Démocratique du Congo[22].

Sous un autre angle, l’UNPC est le seul syndicat des médias institué par la loi portant statut des journalistes. Par ce fait du monopole légal, cette structure s’est dotée de beaucoup plus de pouvoirs dans la mesure où, aux dires de certains experts, le contrôle exercé par elle est excessif, alors que sa mission première reste celle de garantir la liberté de la presse. Par exemple, dans une compréhension la plus simpliste de l’article 5, il est dit que seule l’UNPC est habilité à émettre les cartes de presse alors que dans l’article 54 de la même loi, tout journaliste est libre de s’affilier à toute organisation professionnelle ou syndicale compatible et d’exercer ses activités aussi bien à l’intérieur de l’UNPC ou pas. Ce qui aboutit au fait que, d’après l’UNPC, cette dernière est la seule autorisée à octroyer la qualité de journaliste.

B. Missions principales

L’UNPC a pour missions[23] de :

  • Coordonner les activités des groupements et associations membres ;
  • Défendre la liberté de la presse, le droits et les intérêts généraux de la presse et de ses membres ;
  • Organiser la profession, éditer les règles déontologiques et éthiques et en sanctionner les manquements ;
  • Identifier les journalistes et assimilés opérant en République Démocratique du Congo ;
  • Délivrer la carte de presse conformément à l’article 5 de l’ordonnance- loi n° 81 /012du 02 avril 1981 portant statuts des journalistes œuvrant en République Démocratique du Congo ;
  • Accréditer les journalistes étrangers en mission en République Démocratique du Congo;
  • Représenter la profession à l’intérieur comme à l’extérieur du pays ;
  • Promouvoir la presse sur le plan moral, professionnel et matériel ;
  • Renforcer la compréhension et la solidarité entre ses membres et établir, en son sein des liens entre diverses associations professionnelles de la presse en République Démocratique du Congo ;
  • Maintenir les contacts et promouvoir les échanges de vue entre la presse et les institutions publiques et privées ;
  • Faciliter à ses membres l’accès aux sources d’information ;
  • Organiser des activités de formation professionnelle et syndicale en faveur de ses membres.

II.2.3. Le Journaliste En Danger (JED)[24]

A. Brève présentation de JED

Journaliste en danger (JED) est une organisation indépendante et non partisane de promotion et défense de la liberté de presse crée en 1998. JED est membre de IFEX (International Freedom of Expression Exchange), le plus grand réseau mondial des défenseurs de la liberté d’expression basé à Toronto (Canada). JED est aussi membre du Réseau International de Reporters sans frontières (RSF, Paris), une référence mondiale dans la défense de la liberté d’expression.

Depuis mai 2003, JED surveille également la liberté de la presse dans huit autres pays de l’Afrique centrale couverts par l’OMAC (Organisation des Médias d’Afrique Centrale dont le siège est à Bujumbura, capitale du Burundi. Les 8 autres pays sur lesquels s’étend le mandat de JED sont les suivants : Burundi, Cameroun, Congo/Brazzaville, Gabon, Guinée Equatoriale, République Centrafricaine, Rwanda et Tchad.

JED est née d’un souci que ses fondateurs se sont fait au constat selon lequel, malgré la chute de la dictature du Maréchal Mobutu et la « libération » annoncée par l’avènement de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération) de Laurent-Désiré Kabila, il ne se passait plus aucun jour sans que, quelque part dans notre société, la liberté de la presse ne soit impunément violée, sans qu’une plume ne soit brisée.

Le constat était aussi que les journalistes étaient, souvent, victimes d’une justice sommaire. Tout détenteur d’une parcelle de pouvoir politique, économique ou militaire pouvant se rendre justice chaque fois que le discours de la presse ne l’agréait pas. Le journaliste était alors détenu en prison et son média était interdit de diffusion aussi longtemps que le voulait le bourreau.

Le trio fondateur de JED (Donat M’Baya, Tshivis Tshivuadi et Moro Mwamba), tous journalistes, s’était basé sur la valeur fondamentale de des droits de l’homme : La liberté. La liberté de la presse tire son fondement juridique de trois principaux instruments juridiques internationaux que la République Démocratique du Congo a ratifié. Il s’agit de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, du Pacte international relatif aux droits civil et politique et la Charte Africaine des droits de l’Homme et des peuples. La République Démocratique du Congo a l’obligation de les respecter.

Pour bien surveiller au quotidien la liberté de la presse, JED a mis en place un réseau national d’alerte composé de plus de 250 correspondants. Ce sont ces correspondants qui sont l’œil et les oreilles de JED dans les provinces.

B. Des missions du JED

JED se mobilise au quotidien pour :

  • Surveiller l’exercice de la liberté de la presse dans les 9 pays de la sous-région Afrique Centrale par le monitoring et les enquêtes de terrain sur toutes les allégations d’atteintes à la liberté de la presse ;
  • Mener des actions de protestation (par des lettres ou alertes) et de lobbying auprès des responsables des atteintes à la liberté de la presse afin de faire cesser ces violations dans chacun des pays et/ou obtenir réparation ;
  • Effectuer des visites régulières sur les lieux de détention ou d’emprisonnement des journalistes ;
  • Attribuer (directement ou indirectement) une petite bourse d’assistance aux familles des journalistes tués ou emprisonnés en raison de l’exercice de leur profession ;
  • Apporter une assistance judiciaire aux journalistes ou médias poursuivis devant les cours et tribunaux pour leur travail, par la mise à leur disposition des avocats.
  • Observer les procès intentés contre les médias ou les journalistes ;
  • Participer à des études sur l’amélioration du cadre juridique, politique et économique de l’exercice de la liberté de la presse ;
  • Publier des rapports annuels sur la liberté de la presse ou sur des thèmes spécifiques en rapport avec l’actualité des médias, seul ou avec des partenaires ;
  • Organiser des ateliers, conférences, séminaires sur des questions touchant à l’éthique et à la déontologie, au traitement professionnel de l’information, et à la sécurité des journalistes ;
  • Publier un Magazine dénommé « Plume et Liberté ».

C. Les cinq programmes de JED

Monitoring de la liberté de la presse : c’est la principale action de JED qui consiste à surveiller la liberté de la presse grâce à ses correspondants se trouvant dans les 11 provinces de la République Démocratique du Congo et les pays de la sous de la sous-région.

La professionnalisation des médias : par ce programme, JED sensibilise les professionnels des médias par des ateliers, séminaires notamment sur l’éthique et la déontologie du journaliste, etc.

Défense légale des journalistes et des médias : il s’agit de l’assistance judiciaire des journalistes et des médias déférés devant les cours et tribunaux. Dans beaucoup de provinces, JED a signé des contrats avec des cabinets d’avocats pour la défense des journalistes poursuivis par la justice pour des raisons liées à leur profession.

Lobbying et plaidoyer : JED fait des lobbyings et des plaidoyers pour la réforme des lois qui régissent la presse en République Démocratique du Congo. Tel est le cas de la loi n°96/002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse en République Démocratique du Congo qui date de la période de la dictature. JED fait également de plaidoyer pour la dépénalisation des délits de presse, la loi sur l’accès à l’information, etc.

Fonds d’urgence d’aide aux journalistes en danger : ce fonds est destiné à sécuriser les journalistes qui ont des problèmes. Ex : évacuation d’un lieu à un autre des journalistes menacés. Ce fonds n’est pas disponible. En cas de besoin, JED contacte en urgence ses bailleurs de fonds pour venir en aide au journaliste qui a des problèmes.

III. Etat des lieux de la liberté de presse en République Démocratique du Congo

La liberté de la presse, entendue comme le droit d’informer en toute liberté et celui d’être informé tout aussi librement, découle d’un droit de l’homme consacré par les instruments juridiques tant internationaux que nationaux susvisés.

Le constat est amer dans la mesure où, la liberté d’expression et d’opinion, n’est pas respecté en République Démocratique du Congo par les acteurs politiques, d’où à tout moment les journalistes sont arrêtés, portés disparus, les médias fermés, etc. Alors qu’il existe une institution de régulation et ayant parmi ses missions la garantie et le respect scrupuleux de la liberté de pressé, il s’agit du SCAC.

A la lecture des différents rapports du JED, il est révélé qu’en 2015 par exemple, l’on trouve des cas de pressions et de censures exercées sur les médias et les journalistes par les pouvoirs publics représentent 38% d’attaques contre les médias, soit le record des violations. En outre, au moins 22 journalistes, soit 30% des professionnels des médias ont été privés de leur liberté pendant des périodes plus ou moins longues. Enfin, 25 cas des journalistes agressés ou menacés dans l’exercice de leur profession, ou des médias harcelés.

Au regard de ces chiffres, on peut noter que le métier d’informer demeure un métier à risque en République Démocratique du Congo, et que les autorités congolaises n’ont pris aucune mesure, ni politique, ni administrative pour renforcer la sécurité des journalistes dans leur travail.

Il est à noter que, les atteintes à la liberté de la presse restent toujours très élevées en RDC. Malgré, selon JEJ, une légère diminution quantitative d’attaques dirigées contre les médias et les journalistes observée en 2015, la République Démocratique du Congo présente encore des nombreux défis à relever pour la liberté de la presse et la sécurité des journalistes.

Par ailleurs, les différents gouvernements de terreur qui se sont succédés n’ont jamais pris aucune mesure positive allant dans le sens de l’amélioration de l’environnement de travail des journalistes, ou d’une meilleure sécurisation des professionnels des médias. L’impunité dont jouissent les personnes identifiables, responsables des violations, parfois flagrantes à la liberté de l’information constitue un obstacle majeur au travail des journalistes.

Car, dans toutes les années ciblées par notre étude, le problème est resté le même. Les journalistes sont arrêtés arbitrairement par des fonctionnaires de certains organismes sécuritaires étatiques et traités en dehors du circuit judiciaire normal. Ils sont humiliés, agressés, torturés et placés dans des cachots sans lien avec le parquet. Ils sont généralement privés, non seulement de leur liberté physique, mais de celle d’organiser leurs moyens de défense. Leur libération ne dépend que de l’avis des responsables de ces organismes qui, dans le meilleur des cas, attendent les injonctions du pouvoir politique.

D’où l’exercice de la liberté de presse en République Démocratique du Congo, n’est pas garanti dans la pratique quotidienne, malgré la présence d’une ribambelle de textes juridiques y afférents et des instances de de régulations.

Voilà en grandes lignes comment est organisé l’exercice du droit de la liberté de la presse en République Démocratique du Congo. Le constat semble négatif dans la pratique du respect de ce droit en dépit de l’existence de plusieurs organes qui sont chargé d’assurer son respect. Malgré la liberté de presse soit un droit pour tout citoyen Congolais, il doit cependant être exercé sous certaines conditions et ces conditions constituent les limites à ce droit.

L’étude sur l’exercice de la liberté de presse au premier chapitre nous a servi de pond pour nous permettre d’entamer notre deuxième et dernier chapitre du travail qui porte sur les limites au droit de la liberté de la presse.

Conclusion

La République Démocratique du Congo figure régulièrement sur la liste des pays où les médias sont intentionnellement asphyxiés et il n’existe malheureusement aucun doute que les lois congolaises ne sont pas à la hauteur du standard international concernant une régulation démocratique des médias[25].

Depuis plusieurs années, le problème est le même. Les journalistes sont arrêtés arbitrairement par des fonctionnaires de certains organismes sécuritaires étatiques et traités en dehors du circuit judiciaire normal. Ils sont humiliés, agressés, torturés et placés dans des cachots sans lien avec le parquet. Ils sont généralement privés, non seulement de leur liberté physique, mais de celle d’organiser leurs moyens de défense. Leur libération ne dépend que de l’avis des responsables de ces organismes qui, dans le meilleur des cas, attendent les injonctions du pouvoir politique.

Pour la République Démocratique du Congo, malheureusement, et en dépit des garanties constitutionnelles affirmant la liberté de la presse, corolaire de la liberté d’expression et d’opinion, les années se suivent et ont tendance à se ressembler négativement. Des Journalistes menacés, emprisonnés, agressés, battus, parfois assassinés ; des médias fermés, attaqués à l’arme, parfois brûlés,… tout cela fait partie du paysage politique congolais depuis bien longtemps et ne semble plus impressionner grand monde. Ce rapport en donne des illustrations et affiche des statistiques, des noms des victimes, des dates et des lieux où se commettent des pires exactions contre les journalistes et contre les médias[26].

Ainsi donc, appelés à travailler dans un environnement qui leur est hostile à tous points de vue, politique, économique et sécuritaire, les journalistes congolais semblent se résoudre à faire du “service minimum” c’est-à-dire juste ce qu’il faut pour ne pas prendre des risques et continuer à survivre, la main tendue vers ceux qui les nourrissent.

D’où cette terrible impression que les médias congolais ont cessé d’être un pouvoir, le quatrième pouvoir, pour devenir de simples caisses de résonnance des idéologies et des opinions même les plus ubuesques ; que les chevaliers de la plume ou du micro, ne sont plus devenus que des petits soldats qui obéissent aux ordres des donneurs d’ordre politique ou des pouvoirs d’argent.

Il faut rappeler que la liberté de la presse, qui marche toujours de pair avec la liberté d’expression, est une liberté constitutionnellement garantie. En tant que telle, elle est opposée à d’autres droits et libertés qui, comme elles, sont constitutionnellement protégés. Les droits et libertés qui constituent la barrière de la liberté de la presse sont très nombreux qu’il nous sera impossible de les énumérer tous. Cependant, nous avons constaté que trois de ces droits et libertés sont principaux, il s’agit, du droit à la présomption d’innocence, les droits de la personnalité, l’ordre public et les bonnes mœurs. Ces constituent la limite principale du droit de l’exercice de la liberté de presse.

Bibliographie

  1. Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 20 octobre 1986.
  2. Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948.
  3. Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 16 décembre 1966.
  4. Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la RDC du 18 février 2006.
  5. La loi n° 96-002 du 22 juin 1996 fixant modalité de l’exercice de la liberté de presse, J.O.R.D/C., numéro spécial, Kinshasa aout 2001.
  6. La loi organique n°11/001 du janvier 2011 portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la communication, J.O.R.D.C., numéro spécial Kinshasa 16 janvier 2011.
  7. Loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de presse.
  8. Loi organique n°11/001 du 10 janvier 2011 portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication.
  9. Loi n°013-2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications en République Démocratique du Congo.
  10. Ordonnance n°78-289 du 3 juillet 1978 relative à l’exercice des attributions d’officier et agents de police.
  11. DERIEUX E., Droit des médias, Paris, éd., Dalloz, Paris, 2001.
  12. JONGEN F., Droit de la radio et de la télévision, Bruxelles, éd. Deboeck-wesmael, 1989.
  13. http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/liebrtédelapresse.
  14. http://fr.wikipedia.org.
  15. http://www.jedafrique.org/index.php?option=com_content&view=article&id=185:rapport-annuel-2015&catid=97:rapports&Itemid=1695.
  16. http://www.unpc.info/article-5-17.html.
  17. Présentation de JED, in http://www.jed-afrique.org/index.php?.
  18. http://fr.joellebailard.com/2012/07/31/le-peuple-de-letat-de-new-york-contre-dominique-strauss-kahn/.

Table des matières

i. Introduction 1

II. Exercice de la liberté de presse en République Démocratique du Congo 2

II.1. Liberté de la presse 2

II.1.1. Définition de la liberté de la presse 3

II.1.2. Eléments constitutifs de la liberté de la presse 3

A. La liberté de la presse du point de vue des professionnels de la presse 3

II.2. Les organes charges d’assurer le respect de la liberté de presse 6

II.2.1. Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication 6

II.2.2. L’Union Nationale de la Presse Congolaise 9

II.2.3. Le Journaliste En Danger (JED) 11

III. Etat des lieux de la liberté de presse en République Démocratique du Congo 13

Conclusion 16

Bibliographie 17

Table des matières 18

  1. La liberté de la presse est la manifestation de la liberté d’expression prévue par la constitution Congolaise. En effet, selon la constitution congolaise « toute personne a le droit à la liberté d’expression. Ce droit implique le liberté d’exprimer ses convictions, notamment par la parole, l’écrit, et image sous réserve du respect de l loi, de l’ordre public et des bonnes mœurs. » voir constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/00 du 20 janvier 2011bportant révision de certains articles de la constitution du 18 février 2006,J.O.R.D.C., Kinshsa-5 février 2011 article 23.
  2. Article 8 de la loi n° 96-002 du 22 juin 1996 fixant modalité de l’exercice de la liberté de presse, J.O.R.D/C., numéro spécial, Kinshasa aout 2001.
  3. DERIEUX E., Droit des médias, Paris, éd., Dalloz, Paris, 2001, p.6.
  4. JONGEN F., Droit de la radio et de la télévision, Bruxelles, éd. Deboeck-wesmael, 1989, p.20.
  5. La loi organique n°11/001 du janvier 2011 portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la communication, J.O.R.D.C., numéro spécial Kinshasa 16 janvier 2011, art. 4 litera 8.
  6. La liberté de presse, in http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/liebrtédelapresse, consulté le 23 juillet 2021.
  7. WIKIPEDIA, « La liberté de presse », in http://fr.wikipedia.org, consulté le 23 juillet 2021.
  8. Article 8 de la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de presse.
  9. Article 1 du Code de déontologie et éthique des journalistes congolais.
  10. Article 22 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.
  11. Article 22 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la RDC du 18 février 2006.
  12. Article 3 de la loi organique n°11/001 du 10 janvier 2011 portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication.
  13. Article 24 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la RDC du 18 février 2006.
  14. Article 11 de la loi fixant les modalités d’exercice de la liberté de presse précitée.
  15. Article 24 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la RDC du 18 février 2006.
  16. Article 9 alinéa 8 de la loi organique portant composition, attribution et fonctionnement du CSAC.
  17. Article 9 alinéa 8 de la loi organique portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication.
  18. Article 2 de la loi organisant le CSAC et Manuel traitant du droit des médias en Afrique australe, République Démocratique du Congo, V.1, p.12.
  19. Article 3 de la loi organisant le CSAC précitée.
  20. Manuel traitant du droit des médias en Afrique australe, Op.cit., p.30-31.
  21. Article 8 de la loi n°013-2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications en République Démocratique du Congo.
  22. WIKIPEDIA, « Union nationale de la pesse congolais », in [en ligne] http://fr.wikipedia.org, consulté le 22 juillet 2021.
  23. Missions de l’UNPC, in [en ligne] http://www.unpc.info/article-5-17.html, consulté le 22 juillet 2021.
  24. Présentation de JED, in http://www.jed-afrique.org/index.php?, consulté le 22 juillet 2021.
  25. République Démocratique du Congo, Manuel traitant du droit des médias en Afrique australe, Op.cit., p.2,
  26. JOURNALISTE EN DANGER, La liberté de la presse pendant les élections. Des médias en campagne, Rapport spécial annuel de 2011, pp.7-8.

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